TOC TOC ou le syndrome du mauvais goà»t

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Au chapiteau de Saint-Sauveur, depuis le 1er juillet et jusqu’au 29 août prochain, c’est la comédie de Laurent Baffie, TOC TOC, qui est à l’affiche. Cette pièce de théâtre estivale est une production de Juste pour rire. Après avoir été adaptée pour le Québec en 2007 pour le Festival à Montréal, elle a été présentée à Bromont l’été dernier et c’est maintenant à Saint-Sauveur qu’elle vient séjourner. Avec une aussi grande machine de production et avec un succès proclamé lors des deux derniers étés, les attentes étaient évidemment très grandes lorsque ma conjointe et moi, nous nous sommes présentés au théâtre du Chemin Avila, à Piedmont.

Le chapiteau de Saint-Sauveur est certes le plus grand théâtre d’été au Québec ou, tout au moins, des Laurentides. Près de mille personnes peuvent y prendre place sur le même plancher. C’est immense. En entrant dans la salle climatisée, nous sentons aussitôt l’air frais. Ce sera de courte durée, car dès que le spectacle commence, l’air climatisé cesse de fonctionner. Donc, ce spectacle d’environ deux heures, sans entracte, a pour effet de vicier l’air qui incommode plusieurs spectateurs. Heureusement, les grandes chaleurs de l’été, à l’extérieur, n’étaient pas encore au rendez-vous!

Parlons maintenant de la pièce. Laurent Baffie, l’auteur, est connu surtout comme étant le fou du roi de la version française de Tout le monde en parle. C’est le Dany Turcotte français, mais avec beaucoup moins de talent et de classe. Sa comédie veut mettre en scène six personnages différents atteints d’un TOC ou d’un Trouble Obsessionnel Compulsif. Nous assistons à leur attente commune dans la salle du docteur Stern, très grand spécialiste mondial des TOC.

D’entrée de jeu, après le programme officiel du chapiteau de Saint-Sauveur, c’est Edgar Fruitier, ce grand comédien d’expérience et mélomane, qui met immédiatement la table en nous disant « Fourrez-vous ça dans l’c… ». Ce n’est pas sa faute; il souffre de la maladie ou du syndrome de Gilles de la Tourette, ce qui le pousse à dire ou à poser des gestes vulgaires, obscènes. Évidemment, quand de tels mots sortent de la bouche d’un homme de nature cultivée et distinguée, comme l’est Edgar Fruitier dans la vie de tous les jours, il y a là de quoi surprendre et en faire rire un certain nombre de spectateurs.

Tous les autres patients sont atteints d’un TOC, toutefois non vulgaires ou obscènes. Les Marcel Leboeuf, Élizabeth Chouvalidzé, Danièle Lorain, Émilie Bibeau, Olivier Morin et Amélie Dallaire, l’assistante du docteur Stern, défendent avec brio leur rôle pas toujours facile, même si certains, comme Marcel Leboeuf, ont tendance à en mettre plus que le client en demanderait ou à jouer du déjà vu, si ce n’est leur propre personne. Ce spectacle estival roule pendant près de deux heures à un rythme presque infernal et très répétitif. Car une fois, les personnages bien campés, il ne faut pas avoir fait sa maternelle pour voir venir de très loin les gags qui sont sensés parsemés cette comédie.

Évidemment, si le simple fait, comme un jeune enfant ou un ado attardé, d’entendre les mots pipi, caca, cul et autres de cette catégorie vous fait rire, comme c’était le cas pour mon voisin de droite avec ses six pieds et ses muscles entretenus, courrez vite vous acheter des billets. Vous serez comblés. Toutefois, si vous recherchez une comédie estivale de bon goût et au déroulement imprévisible, fuyez ce spectacle piqué au botox par les productions Juste pour rire. Si ce n’était de cette très grosse machine de production, cette comédie française n’aurait pas le succès au niveau des ventes de billets qu’elle connaît depuis 2007. C’est un succès bourré de stéréoïdes.

Ma conjointe et moi avons attendu avec impatience toute la soirée l’entracte qui n’est jamais venu. S’il y en avait eu un, nous aurions certes quitté sans demander le reste. Nous avons donc subi cette piètre comédie jusqu’à la fin. Quand des gens paient plus de cent dollars par couple pour assister à un spectacle, la qualité au niveau du texte se doit d’être au départ au rendez-vous. Dans le cas de TOC TOC, ce n’est nullement le cas. C’est vulgaire et beaucoup trop répétitif.

Si vous avez cent dollars à mettre sur un spectacle cet été, allez ailleurs. Il y a tellement d’autres choses beaucoup plus belles et intéressantes dans les Laurentides. Gâtez-vous en spectateur averti!

Pierre Lauzon
Les éditions Pommamour

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