Pour son troisième spectacle de sa nouvelle saison, les Diffusions Amal’Gamme avaient convié son public à une soirée où la passion tzigane était le centre d’intérêt en ce samedi, 10 octobre, au Chalet Pauline-Vanier de Saint-Sauveur. Pour que cette passion puisse vivre, il fallait nul autre que Sergeï Trofanov et ses trois musiciens, tous issus plus ou moins fraîchement de l’ex-URSS.
À l’époque où cette super-puissance faisait frémir les Occidentaux, nous faisait vivre une guerre froide, était l’empire du Mal du temps, moi, adolescent et jeune adulte, je faisais partie d’une troupe folklorique, les Farfadets de Sainte-Thérèse. Notre répertoire de danses allait des danses québécoises aux danses allemandes, juives et russes. À chaque année, nous prenions beaucoup de plaisir à exécuter devant le public thérésien ces danses d’ici, mais aussi d’ailleurs, plus particulièrement, les danses juives pour leur légèreté d’exécution et les danses russes pour leur côté énergique. Donc, d’un côté, on tentait de nous faire haïr le peuple de l’URSS, par contre, nous, nous étions séduits par leur musique et leur folklore. Car, aussi paradoxalement que cela puisse paraître, quand on pensait et qu’on pense encore à tous ces pays de l’ex-URSS, la notion de froid nous vient presqu’automatiquement à l’esprit. C’est sans doute en raison de la Sibérie dont on nous a si souvent parlé ou du Goulag aux tristes relents. Toutefois, que de chaleur ressort immédiatement de leur musique et de leurs chansons! Souvenons-nous, ne serait-ce, que des interprétations du chœur de l’Armée rouge!
À Saint-Sauveur, cette chaleur et cette passion étaient évidemment au rendez-vous en ce samedi de mi-octobre. Sergeï Trofanov n’en est pas à sa première visite en sol laurentien. Il nous fait régulièrement l’honneur de sa présence. Il fallait être présent en cette salle de chez-nous pour constater à quel point le charme de ce russe, né en Moldavie, mais résident du Québec depuis plusieurs années, opérait tant physiquement que musicalement chez les dames. De nombreux hommes n’étaient pas indifférents à ses interprétations où régnaient cette chaleur et cette passion slave, à travers non seulement son violon majestueux, mais aussi sa voix si caractéristique de cette région lointaine de notre belle planète.
Si la musique slave occupait une grande partie du programme que nous offraient Sergeï Trofanov et ses trois musiciens, ils nous ont interprété aussi de la musique juive, classique, de films, sans oublier la très belle pièce québécoise de Jean-Pierre Ferland, Ton visage, avec toujours cette même chaleur et cette même passion qui caractérisent si bien la musique slave et tzigane.
Si le virtuose Trofanov a triomphé et charmé à Saint-Sauveur, ses trois musiciens qui l’accompagnaient n’étaient pas en reste. Roman Manolache à la contrebasse, Dumitru Dubanjiu au piano numérique et, surtout, Vladimir Sidorov à l’accordéon Bayan, se sont tous illustrés par leur virtuosité. Quand on pense musique tzigane, on ne peut faire autrement que penser à la sensualité du violon, mais il ne saurait y avoir complètement de cette musique sans l’apport de l’accordéon. Vladimir Sidorov en est un des grands interprètes. Si vous l’avez manqué en ce samedi d’octobre, sachez qu’il sera de retour chez nous le 15 mai prochain, à Prévost, pour une soirée tout aussi chaleureuse, cette fois-là avec les Parfums du Brésil et le Trio Expresso. Mettez cela immédiatement à votre agenda! Sinon, vous risquez de rater une fois de plus ce très grand bayaniste.
Personnellement, en raison certes de mon passé folklorique, n’eût été d’une certaine retenue (et de la présence de mes ex-partenaires de danses!), j’aurais aimé envahir les espaces libres pour me laisser aller aux interprétations invitantes de ces slaves. C’était aussi le cas lors d’une pièce de tango où je me serais laissé emporter avec ma conjointe, mais je ne maîtrise vraiment pas le tango! Je suis convaincu que je n’étais pas le seul en cette salle à être tenté par cette énergie envoûtante. De plus, nous ne voulions pas voler la vedette à Sergeï Trofanov, même si celui-ci nous a invités à quelques reprises à ne pas nous gêner pour occuper l’avant-scène en dansant sur leurs musiques!
Les ouvreurs d’art que sont les Diffusions Amal’Gamme ont encore réussi leur défi, même si le public n’est pas encore autant au rendez-vous comme elles le souhaiteraient. Pour les amateurs de guitare, ce sont deux autres grands virtuoses, le duo Fortin-Léveillé, qui seront au rendez-vous du samedi, 24 octobre, dans la salle de l’Église Saint-François-Xavier, à Prévost. Si vous n’êtes pas encore un de ces amateurs, ces deux guitaristes québécois sauront certes vous conquérir par leurs compositions.
Passez le mot à vos amis! Emmenez vos enfants (c’est seulement dix dollars pour eux!)! Donnons-nous rendez-vous nombreux le 24 octobre prochain! Personne ne sera déçu! Les Diffusions Amal’Gamme vous le garantissent, car elles s’affirment résolument dans les Laurentides comme un gage de très grande qualité.
Pierre Lauzon
Les éditions Pommamour