Imaginez-vous qu’on vous invite à faire escale, l’espace d’une couple d’heures, sur une île dont le cœur qui bat est la musique. N’est-ce pas une superbe invitation pour se laisser bercer par des mélodies de différents horizons apportées par des courants plus ou moins lointains? C’est cette invitation qu’avaient lancée les Diffusions Amal’Gamme pour ce dernier samedi de février.
La réponse ne fut pas enthousiaste. Si on fait abstraction de la famille et des amis de l’artiste au programme, des journalistes et des bénévoles de notre diffuseur laurentien, il y avait trop peu de gens dans la salle de l’Église de Saint-François-Xavier de Prévost pour apprécier la qualité de l’offre musicale. Il y avait trop peu de gens de la municipalité de Saint-Hippolyte qui était le partenaire de cette soirée et dont Andrée Belle-Isle est une concitoyenne. Pourquoi? Est-ce parce que le public habituel des Diffusions Amal’Gamme n’est pas des amants véritables de la chanson? L’année dernière, Karen Young, une chanteuse pourtant très connue et très talentueuse, n’avait guère attiré un large public, même si le spectacle avait eu lieu à Saint-Sauveur. Donc, ce ne saurait être le talent de l’artiste qui serait ici en question. Car Andrée Belle-Isle est de cette race d’artistes qui sont des coureurs de fond. Ils et elles ne sont pas des étoiles filantes, comme certains qui sont la saveur du mois ou de l’année et dont on n’entend plus vraiment parler par la suite. Comme tous ces artistes qui sont là pour durer, Andrée Belle-Isle creuse lentement, mais sûrement, son sillon ici et ailleurs. Suite à son spectacle en octobre 2009 à Saint-Jérôme, je vous ai dit tout le bien que je pensais de cette artiste et du bonheur que j’avais eu à la connaître musicalement.
En ce 26 février, à Prévost, j’ai retrouvé cette même chanteuse à la présence sur scène très chaleureuse et captivante. Elle fait toujours autant preuve d’assurance. Elle parle, elle se raconte davantage pour son public. Ses textes savent sans cesse aller nous toucher. Accompagnée de deux de ses fidèles musiciens, Alain Bertrand à la guitare et François Marion à la contrebasse, deux pros de la musique aux parcours très significatifs, Andrée Belle-Isle nous a charmés par ses chansons comme Le piano de Décibelle, Gitane, Coup de théâtre, Il y a toujours un cœur qui bat, entre autres. Sa voix est toujours aussi juste et agréable à entendre.
Car, lorsque qu’on va assister à un spectacle où une chanteuse est au programme, nos attentes sont avant tout au niveau de la voix, des textes et des musiques des chansons. Toute notre attention veut se concentrer sur les interprétations de l’artiste pour apprécier au maximum ces moments de bonheurs musicaux. Or, quand des gens se permettent de faire de l’interférence durant les prestations de l’artiste en faisant à haute voix des commentaires, cela brise la magie que la chanteuse veut installer dans son spectacle.
C’est d’autant plus malheureux quand cela vient de gens ou d’amis de la famille de l’artiste. Ce n’est pas parce qu’on connaît très bien cette chanteuse, ce n’est pas parce qu’on a soixante ans et plus que cela devient plus acceptable, plus excusable. Le respect de l’artiste, le respect du public qui est venu pour l’entendre (et uniquement elle!) commandent de se taire et de garder ses commentaires, même s’ils sont positifs, pour l’entracte ou l’après-spectacle. La salle des Diffusions Amal’Gamme n’est pas un club. C’est une véritable salle de spectacles avec tout ce que cela exige. Si on demande de bien vouloir éteindre nos cellulaires, ce n’est surtout pas pour entendre des gens parler. Ces gens, ce couple en particulier, sont de cette catégorie sans cesse croissante de pollueurs de nos salles de cinéma et qui se croient partout comme s’ils étaient dans leur salon. C’est malheureux que, même si on les avertit, ils fassent fi de notre rappel à l’ordre pourtant recherché. Comme quoi le respect, ce n’est pas une question d’âge.
Heureusement, la voix et la musique réussissaient le plus souvent à enterrer ces voix discordantes! En dépit de tout, Andrée Belle-Isle nous a convaincus que nous avions raison d’avoir accepté de faire escale sur son île, dans son univers musical. Le bonheur fut quand même au rendez-vous. Elle a gagné encore une fois son pari de nous séduire et de nous prouver qu’elle a sa place pour longtemps dans notre monde musical au Québec.
Elle sortira en mai prochain, au Studio-théâtre de la Place des Arts, à Montréal, son premier album, Mon cœur qui bat. Il ne reste qu’à souhaiter que cette carte de visite lui ouvrira encore davantage les portes de nos médias, radio et télévision, pour que de plus en plus de Québécois et de Québécoises soient à leur tour séduits par ses trésors musicaux qu’elle peaufine depuis déjà plusieurs années. Que nos ondes positives l’accompagnent pour un avenir de plus en plus prometteur!
Pierre Lauzon
Les éditions Pommamour