La maturité musicale

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Si 2010 a été l’année du bicentenaire de la naissance de Frédéric Chopin, 2011 est celle du bicentenaire de celle de Franz Liszt. Donc, ce sont deux très grands compositeurs qui ont marqué le dix-neuvième siècle par leur talent de compositeur et d’interprète pour traverser les frontières et le temps et se rendre jusqu’à nous pour notre plus grand plaisir. Dans cette peinture de Josef Danhauser, nous voyons Liszt jouant pour Beethoven, entouré d’Alexandre Dumas, père, de Victor Hugo, de Paganini, de Rossini, de George Sand et de Marie d’Agoult (assise de dos sur le plancher). Cela vous donne une idée de l’univers dans lequel Franz Liszt baignait.

C’est donc avec ce compositeur hongrois d’exception que nous avions rendez-vous dans la salle des Diffusions Amal’Gamme, à Prévost, en ce premier magnifique samedi d’avril. Pour interpréter et nous donner un bref aperçu de l’œuvre de Liszt, notre diffuseur laurentien avait fait appel à un pianiste, Michel Kozlovsky, qui est présentement professeur au Conservatoire de musique de Trois-Rivières. Sans vouloir le vieillir outre mesure, monsieur Kozlovsky n’est pas un artiste de la relève ou en pleine ascension dans sa carrière. Il a déjà une très longue feuille de route.

Avant tout pédagogue, puisqu’il a enseigné non seulement un peu partout au Québec, mais aussi aux États-Unis, il a réussi à donner de nombreux concerts solo, avec orchestre ou comme chambriste, tant au Canada que chez nos voisins du Sud. Son répertoire est très vaste, allant de Scarlatti à Schoenberg, en passant, entre autres, par Beethoven, Chopin, Ravel, Rachmaninoff, Bartok et, évidemment Franz Liszt. Comme vous voyez, c’est à un artiste avec une très grande connaissance et une très grande maturité musicales que nous avions affaire.

Ce côté pédagogue est ressorti à quelques reprises lors de cette soirée. Accompagné de ses notes, pour ne pas dire n’importe quoi comme l’aurait fait un de ses grands professeurs, lors de sa formation, il s’est appliqué, au grand plaisir du public, plutôt nombreux, à nous aider à mieux cerner le personnage Liszt et les œuvres au programme. C’est ainsi qu’il nous expliqua que, pour cadrer dans le Carême actuel (Eh, oui! L’aviez-vous oublié, vous, pauvres pécheurs?), il amorçait cette rencontre par l’Air du Stabat Mater de Rossini, le Cujus animam. Vous allez me dire : Est-ce un récital Rossini ou Liszt? Je sais que cela peut être mélangeant. C’est qu’en fait Franz Liszt a non seulement composé de très nombreuses œuvres très personnelles et a fortement influencé l’évolution de la musique de son temps, mais il s’est aussi souvent inspiré des œuvres d’autres compositeurs de son époque comme Rossini ou comme Paganini, qui étaient au programme pour ce spectacle Extravaganza.

La maturité et la maîtrise de Michel Kozlovsky ont transpiré tout au long de ce récital. Alors que la première partie mettait en lumière tout le dynamisme qui caractérise la plupart des œuvres de Lizst, dont la Rhapsodie espagnole, monsieur Kozlovsky s’est attaqué à une œuvre très exigeante, d’une durée de près de trente minutes, la Sonate en si mineur. Le public a été ravi et l’a fait savoir à notre artiste invité. Seule note qui m’a quelque peu étonné, c’est une œuvre d’un autre compositeur qu’il nous a offert en rappel sans véritable présentation, comme si l’interprète était quelque peu fatigué. Pourtant, il y a des œuvres très connues de Franz Liszt dans lesquelles Michel Kozlovsky aurait pu piger pour venir mettre la cerise qu’il fallait sur le « sundae » Liszt.

Pour le prochain rendez-vous, le samedi, 16 avril, c’est la formation Kleztory qui sera à Prévost. De la musique enlevante et pleine d’émotions qui perpétue les traditions juives et tziganes de l’Europe de l’Est avec un accordéoniste, un contrebassiste, un guitariste, un clarinettiste et une violoniste, ça promet! (écoutez pour un avant-goût)

Pierre Lauzon       
Les éditions Pommamour