Je dois le reconnaître. J’ai un faible pour l’accordéon. J’en ai un également pour la harpe, mais c’est là une toute autre histoire. C’est peut-être qu’inconsciemment je me prépare pour mon prochain séjour dans l’éternité. Toutefois, pour l’accordéon, c’est bien pour mon voyage terrestre actuel. Je ne suis pas seul, car ma conjointe a aussi cette même faiblesse, sans parler du public nombreux qui a répondu à l’invitation des Diffusions Amal’Gamme en ce dernier samedi d’octobre.
Je dois le reconnaître. J’ai aussi un faible pour Vladimir Sidorov, musicalement, il va sans dire, au même titre que tous ces gens présents dans la salle de notre diffuseur laurentien à Prévost. Vladimir, si je peux me permettre, n’en est pas à sa première visite dans notre coin de pays. Nous avons eu le bonheur de le voir tirer son épingle du jeu lors de prestations musicales précédentes. Toutefois, il évoluait toujours au sein d’un groupe. Déjà là, il savait attirer notre attention sur sa musicalité. En ce samedi de pré-halloween, Vladimir est venu seul cette fois, non pas pour nous faire peur, mais, tout au contraire, pour nous charmer. Il est venu avec son accordéon chromatique de concert russe, appelé le bayan. Cet accordéon aux multiples possibilités est doté d’un clavier de 105 boutons disposés sur cinq rangées pour la main droite, et d’un clavier de 120 boutons disposés sur six rangées pour la main gauche. Comme si ce n’était pas suffisant, il y a également des anches qui permettent de varier les sonorités pour une même note et un système de registres de seize touches situées au-dessus du clavier droit qui permettent de varier le timbre. Vous croyez qu’évidemment un tel instrument se joue avec les deux mains comme pour tout autre accordéon. Détrompez-vous ! Vladimir nous a appris qu’il y a également d’autres registres qui sont situés sur le dessus du bayan et que le bayaniste actionne avec son menton. Comme vous voyez, c’est loin d’être un jeu d’enfant que de faire vibrer musicalement un tel instrument.
Vladimir, d’origine russe, mais vivant maintenant au Québec depuis plusieurs années, a acquis l’essentiel de sa formation en Russie. Il a même fait partie du célèbre Chœur de l’armée rouge, non pas en tant que chanteur, mais comme bayaniste pour accompagner musicalement les danseurs, qui font aussi partie de ce groupe légendaire, dans leurs prouesses parfois acrobatiques.
Vladimir manifestait beaucoup de plaisir d’être ainsi présent parmi nous dans la salle de spectacle de Prévost. Il pouvait, pour la première fois chez nous, faire montre de toute sa versatilité musicale, se promenant de Chopin à Astor Piazzolla, sans oublier de nous gâter avec ses propres compositions. Bien assis au milieu de cette scène toujours bien aménagée, Vladimir a su nous amener d’entrée de jeu dans son univers si captivant. Dans un français plus qu’acceptable (ce qui est tout à son honneur de respecter ainsi son peuple d’accueil, ce que certains autres se refusent de faire même s’ils y sont nés !) et avec un humour savoureux, il s’est adressé à plusieurs reprises à son public pour présenter ses pièces au programme, mais aussi pour l’éveiller à son instrument particulier, même si, à première vue, il ressemble à n’importe quel accordéon que nous connaissons.
Il fallait le voir faire respirer sa musique, en tirer mille et une sonorités, la rendre triste ou enlevante. Il fallait voir les doigts de Vladimir vivre totalement sur ces claviers. Il faut beaucoup d’habilité, de souplesse et d’amour musical dans ces doigts pour arriver à en extraire de telles sonorités qui ne peuvent faire autrement que nous charmer. Nous avons alors le goût de lui dire encore et encore : « Vas-y, Vladimir ! Emporte-nous ! Berce-nous de ta musique ! Comme le monde est beau dans ton univers ! ».
Il va sans dire que si Vladimir nous offre des œuvres des grands maîtres comme Chopin ou d’autres, alors qu’ils n’ont jamais composé pour le bayan ou pour l’accordéon, mais plutôt pour l’orgue, le piano ou le clavecin, c’est que lui et d’autres en ont fait des transcriptions et des arrangements qui feraient sans nul doute le bonheur de ces compositeurs classiques. Le doigté exceptionnel de Vladimir a su nous en convaincre.
Vous regrettez de n’avoir pu être présent pour cette soirée exceptionnelle musicalement ? Vous aimeriez revoir bientôt Vladimir tirer son épingle du jeu à Prévost ? Sachez qu’il sera de retour le 21 janvier prochain pour accompagner le talentueux violoniste, Sergeï Trofanov, qui revient nous rendre visite dans la salle des Diffusions Amal’Gamme. Gâterez-vous encore votre plaisir ?
Le prochain rendez-vous de notre diffuseur laurentien est le 12 novembre prochain avec Christine Tassan et les Imposteures, quatre québécoises qui promettent de nous en mettre plein la vue et les oreilles avec leur spectacle « Pas manouche, c’est louche ». Un petit avant-goût en cliquant sur le lien suivant : http://www.youtube.com/watch?v=_LieXvxCAYQ .
Pierre Lauzon
Les éditions Pommamour