Le documentaire Le fantôme de Mirabel, des réalisateurs québécois Éric Gagnon Poulin et Louis Fortin, a provoqué plusieurs débats dans le cadre du 2e Forum européen des Grands projets inutiles imposés en France du 7 au 11 juillet dernier. L’Association Citoyenne Intercommunale des Populations concernées par le projet d'Aéroport de Notre-Dame-des-Landes (ACIPA) a cru bon inviter les documentaristes pour illustrer leur lutte au public français à travers du combat des expropriés de Mirabel. Les 4 projections, dont les deux premières ont fait salle comble, ont attiré une forte assistance et ont suscité de longs débats en présence des réalisateurs. La lutte des expropriés de Mirabel et le discours du développement du gouvernement du temps semblent malheureusement toujours d’actualité pour les Nantais se battant contre le projet d’aéroport à Notre-Dames-des-Landes.
Comme à Mirabel, plusieurs citoyens remettent en question la nécessité de construire un nouvel aéroport qui remplacerait celui de Nantes-Atlantique et qui deviendrait la « la porte d’entrée du Grand Ouest », un aéroport d’envergure international. Le fantôme de Mirabel dénonce justement ce discours du développement au nom du « bien commun », ce que le public a particulièrement apprécié dans ce film. D’ailleurs, le Parlement européen estime qu'il faut éviter la prolifération des aéroports régionaux. Ici, les politiciens prétendent qu’il ne s’agit pas d’un « nouvel » aéroport, mais bien d’un « transfert ». Sans compter que Nantes-Atlantique a été nommé meilleur aéroport européen en 2011, alors pourquoi vouloir le fermer? Comme à Mirabel, on peut se demander à qui ce méga projet profitera et quels en sont les véritables motifs.
Dans le documentaire, les Nantais ont appris qu’en 1969, le gouvernement libéral de Pierre Elliott Trudeau s’était empressé d’exproprier les agriculteurs sous l’ancienne loi de 1867, avant que la nouvelle loi sur l’expropriation soit adoptée la même année, ce qui leur a encore une fois permis de faire des liens avec leur situation. Dans ce cas-ci, les porteurs du projet semblent s’empresser pour commencer la construction (2013), pour ne pas devoir répondre aux diverses études démontrant son inutilité. « Les porteurs du projet restent d’ailleurs muets à ce sujet et refusent de répondre à nos questions », a souligné Christian Grisollet de l’ACIPA lors d’un débat.
Finalement, les principaux arguments pour le projet sont similaires à ceux qui ont motivé la construction de l’aéroport de Mirabel, soit la sécurité et la saturation éventuelle de Nantes-Atlantique. Dans le cas de Mirabel, il ne s’agissait que de spéculations relevant du discours du développement au nom du « bien commun » afin de faire accepter le projet à la population. En France, un collectif de pilotes dénonce d’ailleurs ces arguments en affirmant qu’il n’y a pas de problème de sécurité à l’aéroport de Nantes-Atlantique, pas de saturation, voire une diminution de l’activité aérienne.
Bref, Le fantôme de Mirabel a soulevé plusieurs questions lors de son passage en France. Les deux réalisateurs ont d’ailleurs été approchés pour en faire une diffusion plus large en Europe. http://www.lefantomedemirabel.com
Sur la photo : Alain Caillaud de l’ACIPA en compagnie des réalisateurs Éric Gagnon Poulin et Louis Fortin au cinéma le Concorde à Nantes.