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J'en ai marre… de la démocratie scolaire! Imprimer Envoyer
Johnny Marre
Lundi, 04 Mai 2009

Ayant œuvré en éducation pendant plus de trente-cinq ans, ayant milité syndicalement pendant une grande partie de ces années à divers échelons, j’ai connu les élus scolaires dans leur cheminement (car il serait faux d’écrire ici le mot évolution) du début des années soixante-dix à aujourd’hui. C’est un tableau tragique.

Pourquoi? Parce qu’au cours de toutes ces années, une nouvelle race de gestionnaires a pris possession du système scolaire non seulement au niveau gouvernemental, mais aussi et surtout au niveau local. Autrefois, les élus scolaires ou les commissaires détenaient beaucoup de pouvoir. Le directeur-général ou le secrétaire-trésorier n’était que l’exécutant des décisions des élus. Il faut reconnaître que gérer une commission scolaire à cette époque, où leur taille était beaucoup plus à l’échelle humaine, était relativement simple.

Petit à petit, de réforme de l’éducation en réforme de l’éducation, de petit territoire en territoire de plus en plus vaste, la commission scolaire d’hier s’est beaucoup complexifiée. Il a fallu de plus en plus de gestionnaires, de cadres scolaires avec tout le personnel qui s’y rattache. Quand j’ai débuté dans l’enseignement, je pouvais appeler directement le directeur-général pour prendre rendez-vous avec lui afin de pouvoir lui présenter un projet. Je pouvais appeler la secrétaire pour avoir des explications sur mon relevé de salaire, sur mes assurances, sur un congé-maladie. Le directeur-général ou la secrétaire connaissait tout le monde de la commission scolaire à cette époque.

Quand j’ai pris ma retraite au début des années 2000, il aurait été plus facile sûrement d’avoir une audience avec le Saint-Père qu’avec le directeur-général. Pour avoir des informations ou des explications au niveau de mes conditions de travail, je devais communiquer (ou plutôt laisser un message dans sa boîte vocale) avec la secrétaire X pour mon relevé de salaire, avec la secrétaire Y pour mes assurances, avec la secrétaire Z pour mon régime de retraite. Ce n’est nullement parce qu’il y a moins de personnel qu’autrefois. C’est que tout le système s’est ridiculeusement complexifié et déshumanisé. L’augmentation du personnel dans la boîte administrative ne cesse de prendre des proportions inquiétantes, car c’est reconnu un ogre administratif a une faim sans limites et se crée sans cesse des besoins pour justifier son existence.

Et les commissaires dans tout cela? Ils ne sont plus depuis longtemps de taille à faire face à tous ces supposés spécialistes de l’éducation. Comment un commissaire qui ne s’occupe d’éducation qu’à temps partiel et qui, pour l’immense majorité, n’a aucune formation pédagogique ou administrative, peut-il argumenter ou défaire les arguments de cadres qui font cela à temps plein et qui ne cesse de se spécialiser dans leur domaine? Le commissaire est un nain dans un monde de géants, un jeune enfant dans un monde d’adultes.

À la fin des années soixante-dix, un président de commission scolaire me disait qu’au prix où il payait son directeur-général, si ce dernier disait que c’était blanc, ce devait être blanc, s’il disait que c’était d’une autre couleur, c’est elle qui se devait de l’emporter. Imaginez-vous aujourd’hui!!! Depuis ce temps, les cadres ont appris aussi à se raffiner et ont développé de très nombreuses tactiques pour mieux faire passer leurs visions des choses. Il faut un cadre carrément incompétent pour que les commissaires n’endossent pas sa vision des choses. Depuis, plusieurs années, les commissions scolaires ont du personnel à temps plein pour gérer toute la dynamique des communications tant à l’interne qu’à l’externe. C’est tout dire.

J’en ai donc marre de toute cette mascarade éhontée d’une supposée démocratie scolaire. Il n’y a aucune démocratie. Ce n’est que la gestion d’un système dont les plus grosses ficelles viennent du ministère de l’Éducation. Pour qu’il y ait démocratie, il faut des forces égales en présence et des débats véritables sur les choix ou les options que nous voulons offrir à nos enfants. Actuellement, il n’y a plus de forces égales, tout comme il n’y a aucun débat véritable sur nos choix en éducation, tant au niveau local que national. Et je ne vous ai pas parlé de cette autre mascarade qu’est le conseil de gestion au niveau des écoles. Pauvre démocratie! Nos enfants et notre démocratie mériteraient tellement mieux!!!

Johnny Marre