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Un sauveur nous est né Imprimer Envoyer
Johnny Marre
Lundi, 18 Octobre 2010

Dernièrement, une revue anglophone a réussi un tour prestigieux de marketing en mettant le Québec en première page comme étant la province la plus corrompue de notre cher (à tous les points de vue!) Canada. Cette astuce de marketing, qui leur a permis de vendre tous leurs exemplaires, est d’autant plus génial qu’il permet à sa petite sœur (donc du même empire ou de la même famille) de faire du millage journalistique en essayant de ramener les pendules québécoises et canadiennes à l’heure. Chapeau, Rodgers!

Pour expliquer cette tendance à la corruption, cette revue y trouvait sa source, entre autres, dans les gênes mêmes des Québécois et des Québécoises. C’est fou ce qu’il peut y avoir dans ces gênes, dont nous ne soupçonnons même pas le plus souvent l’existence. Pas plus fou que cet empire des communications, j’ai moi aussi trouvé une explication à un autre des phénomènes québécois : la nécessité d’un sauveur. Depuis plusieurs jours déjà, les médias nous informent que des gens très connus réfléchissent sur l’avenir à donner à la gouvernance de notre nation. Que des gens réfléchissent, c’est sûrement signe de santé pour notre démocratie et nous devrions nous en réjouir. Le contraire serait beaucoup plus inquiétant. Pour le moment, ils réfléchissent. En passant, ça ne vous arrive pas vous aussi de réfléchir? Pourtant, personne n’en parle. Ah, j’oubliais! Vous n’êtes pas un personnage connu et médiatisé.

Ces gens se réunissent dans une résidence cossue d’Outremont ou en d’autres lieux tout aussi proprets. Ils réfléchissent en groupe, sans doute autour d’une bonne bouffe et d’un vin de qualité de la SAQ. Que veulent-ils faire concrètement? Ils n’en savent trop rien pour le moment. Ils sentent un vide politique. Qui leur a dit cela? Ils cherchent comment eux, ces grands penseurs, pourraient-ils combler ce vide? C’est tellement agréable de chercher à changer le monde autour d’une bonne table!

Sur une simple hypothèse médiatique, sans aucun programme vraiment défini, sans aucune équipe de candidats potentiels pour réaliser ce programme, sur la seule base de gens qui réfléchissent, un sondage publié le 12 octobre dernier nous apprenait que 46% des Québécois seraient intéressés à voter pour un parti politique initié par François Legault et que 30% de ces mêmes Québécois seraient déjà prêts à voter pour ce parti, ce qui est supérieur à tous les autres partis politiques actuels.

Ma première réaction en fut une d’étonnement. C’est pas sérieux, me suis-je dit. Puis, une fois remis de la désolation que beaucoup trop de Québécois et de Québécoises pensent et réagissent selon l’humeur du temps, j’ai cherché à trouver une explication rationnelle. C’est alors que nos gênes sont venus à ma rescousse. Vous rappelez-vous du Minuit chrétien de la grande messe de la nuit de Noël? Ah, comme nous étions heureux d’entendre le ténor du village ou de la paroisse s’égosiller à nous chanter qu’un sauveur nous était né! Nous étions tout aussi heureux que le peuple élu de Dieu le fut lors de la venue de Moïse ou de Jésus. Nos racines québécoises remontent à aussi loin que cela et ont été solidement cultivées pendant des siècles par nos pasteurs catholiques.

Plus près de nous, vous vous souvenez de René Lévesque, Pierre Elliot-Trudeau, Lucien Bouchard ou même de Mario Dumont? Leur arrivée sur la scène politique avait suscité beaucoup d’espoir. À chaque occasion, nous avions trouvé le sauveur tant attendu. Vous connaissez la suite. L’emballement a toujours fait place à la plus grande des désillusions, à la plus grande des déceptions. Comme si un sauveur, ça pouvait vraiment exister.

J’en ai marre de cette quête d’un sauveur, de quelqu’un qui va régler à notre place tous nos problèmes. J’en ai marre de notre comportement d’ado qui s’en remet toujours aux autres pour assumer son petit bonheur quotidien et qui se décharge constamment sur son entourage pour tous ses maux, comme s’il n’en était pas une des causes les plus probables. Arrêtons d’attendre un sauveur! Assumons-nous! Soyons un peuple adulte!

Que le respect vers une plus grande maturité collective nous accompagne!

Johnny Marre

P.S. : Si jamais le richissime François Legault devenait chef de parti et aspirait à devenir le premier ministre du Québec, est-ce qu’on lui reprocherait sa fortune? Ah, oui, j’oubliais! Ce n’est pas une femme.